
La méditation pleine conscience
La pleine conscience de soi entre dans le
champ des TCC de nouvelle vague et désigne la capacité de porter une attention
particulière à ce qui est vécu au moment présent, dans le non-jugement,
sans se laisser distraire par des pensées relatives à des préoccupations
du passé et du futur. Il est donc préconisé de s'arrêter aux sensations
de notre corps, d'observer les couleurs autour de nous, d'écouter les
sons, de sentir naître les pensées etc...en somme d'apprendre à s'affranchir
du parasitage du stress.
Les protocoles d'évaluation attestent de succès thérapeuthiques.La MBCT
( mindfulness-based cognitive therapy ) a fait ses preuves contre la depression.
Cependant elle ne s'attaque pas à la depression elle-même, qu'il faut
traiter par ailleurs. Elle augmente les chances de ne pas rechuter, surtout
pour les personnes qui ont déjà connu deux épisodes sévères. La méditation
n'opère pas de miracle certes mais elle contribue à améliorer le bien-
être de ceux qui la pratiquent avec régularité.
La pleine conscience. On commence à admettre, en France,
que la méditation de pleine conscience peut aider à combattre l’anxiété,
le stress et autres maux contemporains.
Par Anne-Laure GANNAC, republicain-lorrain.fr
le 03/03/2014
Elle est partout. Dans les
médias, en librairies, en cabinets et dans les hôpitaux, la
méditation de pleine conscience s’impose comme la nouvelle technique
antistress… Que peut-elle vraiment ? Explications et initiation.
" Le pays de Descartes et de la dogmatique séparation du corps et de l’esprit
vit une révolution ", assure Jean-Gérard Bloch, médecin rhumatologue.
A l’origine : la méditation de pleine conscience, ou comment apprendre
à porter son attention sur ce qu’on vit, sans jugement, instant après
instant. Un concept bouddhiste qui, filtré par les neurosciences et les
thérapies cognitives sur une idée de l’Américain Jon Kabat-Zinn, est devenu
un outil thérapeutique permettant de combattre l’anxiété, la douleur,
la dépression et autres maux de nos sociétés contemporaines. " Il y a
cinq ou six ans, lorsque je parlais de la méditation de pleine conscience
à mes patients ou en conférence, on me regardait avec de gros yeux, se
demandant de quelle secte je sortais , se souvient la psychiatre Yasmine
Liénard, auteur de " Pour une sagesse moderne, les psychothérapies
de troisième génération " ( Odile Jacob Poches ). Désormais, ce sont
les gens qui me contactent, pour des renseignements ou pour pratiquer.
"
La
découverte en psychiatrie
Tout est parti du monde de la psychiatrie, rappelle-t-elle : " À l’hôpital
Sainte-Anne, à Paris, où je pratiquais, on proposait certes des thérapies
cognitives et comportementales, mais surtout de la psychiatrie classique,
médicamenteuse. Mais au début des années 2000, on a découvert les travaux
de Segal, Williams et Teasdale, montrant les effets d’une nouvelle technique
de thérapie cognitive fondée sur la méditation, contre la rechute dépressive.
Cas contre lequel nous butions, à l’époque. Comme Christophe André, David
Servan-Schreiber et d’autres, j’ai décidé de me former à ces techniques
et à celles de Jon Kabat-Zinn. Nous en sommes revenus avec la conviction
que la méditation pouvait transformer la psychiatrie, ce qui a peu à peu
attiré les gens en quête d’alternatives à la psy classique. " La médiatisation
fait le reste : " Dès que Christophe André sort un livre, je vois une
nouvelle vague de patients arriver ! ", plaisante Yasmine Liénard. Et,
depuis quelques années déjà dans nos pages, mais récemment dans les magazines
non spécialisés, on donne la parole à Jon Kabat-Zinn, après plus de vingt
ans de notoriété outre-Atlantique. Ce retard n’est certainement pas sans
lien avec notre attachement culturel à la psychanalyse, qui rend plus
difficile qu’ailleurs la diffusion des travaux du camp comportementaliste…
La
multiplication des études
Jean-Gérard Bloch ajoute que ce soudain succès de la pleine conscience
tient à la quantité impressionnante d’études scientifiques parues ces
dix dernières années : " Pour les Occidentaux, a fortiori les très cartésiens
Français, la science ne peut valider une simple "investigation intérieure"
comme l’est la méditation. Or, avec les techniques d’imagerie, qui permettent
de visualiser les mécanismes de notre cerveau lors des états méditatifs,
et bien d’autres études, cela est devenu vrai selon nos propres critères,
parce que visible et vérifié. " Cela explique, selon lui, qu’il n’ait
pas eu de difficulté à mettre en place, en 2013, un diplôme universitaire
Médecine, méditation et neurosciences à l’Université de Strasbourg
et, bientôt, il en est persuadé, dans d’autres universités françaises.
" Au cours de leur formation, de plus en plus de futurs médecins et futurs
psys se montrent intéressés par la pleine conscience, et par les approches
"corps-esprit" en général. " Et même si la France a du retard en la matière
par rapport aux États-Unis, les projets de modules de méditation de pleine
conscience dans les écoles, auprès des élèves comme des enseignants, mais
aussi dans les entreprises, commencent à se développer.
Les
risques de confusion
Qui les propose ? C’est la question préoccupante selon Yasmine Liénard,
qui avoue que, en coulisses, ce monde désormais vaste de la pleine conscience
vit une guerre entre les non-psys et les psys, dont elle est. " Avec ce
succès, on a vu toutes sortes de gens, n’ayant aucune connaissance de
la psychologie mais s’intéressant de près ou de loin à la méditation,
proposer leur expérience pour tout soigner ! " Ce qui, explique-t-elle,
représente un double danger : " D’abord celui de laisser croire qu’il
suffirait de s’asseoir et de respirer pour ne plus avoir de problème ni
de maladie. C’est faux, bien sûr ! On ne soigne pas tout et n’importe
quoi avec la méditation. Certaines maladies sont soignées par le biais
des protocoles MBSR et MBCT à la fois très précis, très pédagogiques et
répondant à des indications particulières. "
Autre
danger
Confondre le champ du développement personnel et celui de la psychiatrie.
" Dans le premier, on peut certes choisir de suivre un groupe de méditation
de pleine conscience dirigé par une personne formée à la MBSR. Mais on
peut aussi trouver une personne offrant une formidable initiation à la
méditation sans avoir de connaissances psy ni de formation à la MBSR.
Un séjour auprès du maître bouddhiste Thich Nhat Hanh (qui a créé en France
le Village des Pruniers où il accueille des méditants depuis 1982) par
exemple, sera plus enrichissant qu’auprès d’un formateur MBSR qui n’a
qu’un an de pratique ! En revanche, dans le cas de la maladie psychique,
la méditation de pleine conscience est utilisée en tant qu’outil cognitif,
c’est-à-dire comme un travail spécifique sur les pensées, et proposée
dans le cadre d’une prise en charge plus complète. Et, pour cela, des
connaissances psy sont absolument indispensables. "
S’autoproclamer spécialiste antistress
sous prétexte d’avoir fait quelques retraites de méditation, la tentation
est grande, pour qui veut surfer sur la vague. Mais c’est une dérive inquiétante,
reprend Yasmine Liénard, " parce que dans un groupe de personnes qui vous
disent souffrir d’anxiété, vous pouvez avoir un schizophrène ou un suicidaire,
et vous devez être en mesure de les identifier ". À la tête d’une commission
créée au sein de l’Association pour le développement de la mindfulness,
elle se donne pour mission de réguler cet univers en expansion, mais sans
pour autant freiner celle-ci, ni stimuler les conflits internes. Tâche
délicate mais nécessaire, si l’on ne veut pas gâcher ce début de petite
révolution française.
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